Le samedi
3 janvier 1998,
Chiapas-Sécurité
stricte à la prison des 46 suspects
par Caroline Brothers
TUXTLA GUTIERREZ (MEXIQUE), 3 janvier, Reuters - Des
unités d'élite de la police mexicaine ont
été affectées à la surveillance
d'une prison surpeuplée de Tuxtla Gutierrez, capitale
du Chiapas, où sont détenus 46 hommes
soupçonnés d'implication dans le massacre de
45 Indiens le 22 décembre au village d'Acteal.
Les six derniers suspects ont été
arrêtés le 31 décembre et
transférés à Cerro Hueco dans un climat
de tension grandissante au Chiapas, où des groupes
paramilitaires sont engagés dans ce que beaucoup
qualifient de "sale guerre" contre les partisans du
mouvement zapatiste.
"Nous avons renforcé la sécurité
ici. Le gouvernement de l'Etat a envoyé quarante
éléments des forces de sécurité
depuis le 28 décembre", a déclaré
Eduardo Coutino Arrazola, directeur de la prison. "C'est une
affaire spéciale, aussi observe-t-on une vigilance
particulière."
Les autorités redoutent que le centre
pénitentiaire, qui est conçu pour 500
détenus mais en abrite 870, ne se transforme un foyer
d'agitation.
Dix-sept sympathisants de l'Armée zapatiste de
libération nationale (EZLN), qui a
déclenché une insurrection il y a quatre ans,
sont aussi détenus à Cerro Hueco. La prison
est construite sur une colline qui domine Tuxtla Gutierrez.
Jeudi, des soldats ont découvert une cache d'armes en
territoire zapatiste.
Parmi les 46 personnes soupçonnées de
participation au massacre figure Jacinto Arias Cruz, membre
du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI) au
pouvoir et maire de la ville de Chenalho, proche du village
d'Acteal. Les suspects sont accusés d'homicide
volontaire et d'association de malfaiteurs.
L'affaire a plongé dans un profond embarras le
gouvernement mexicain, qui résiste aux voix
réclamant la démission du gouverneur du
Chiapas et du ministre fédéral de
l'Intérieur.
Vendredi, les autorités ont annoncé que la
police avait saisi dans une autre cache des armes et des
munitions semblables à celles qui ont
été utilisées dans le massacre. La
cache se trouvait derrière un tas de bois, en face de
la maison de l'un des suspects.
Le juge Roberto Alejandro Navarro Suarez, qui est
chargé de l'affaire, a déclaré que tous
les suspects rejetaient les accusations portées
contre eux. "Ils nient tous les faits et se déclarent
innocents", a-t-il dit en ajoutant qu'il ne se laisserait
pas imposer un verdict rapide.
"Nous devons respecter la loi, et aucune pression n'est
exercée pour que l'on agisse précipitamment.
Une décision pourrait prendre dix mois."
Des observateurs se rendent chaque jour à la
prison pour y surveiller le traitement des 46
détenus, qui sont répartis dans onze dortoirs.
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Les
accords de paix au Chiapas, dossier central du nouveau
ministre de l'Intérieur
par Victor FLORES
MEXICO, 3 jan (AFP) - Le nouveau ministre de
l'Intérieur mexicain nommé samedi, Francisco
Labastida Ochoa, devra s'atteler à la délicate
question des négociations de paix avec les rebelles
zapatistes au Chiapas, suspendues depuis 15 mois, et
à l'élaboration d'un nouveau plan de
sécurité nationale.
Samedi, le président Ernesto Zedillo a, contre
toute attente, accepté la démission du
ministre de l'Intérieur Emilio Chuayffet, et a
nommé à sa place M. Labastida, manifestant
ainsi le premier signe décisif de l'exécutif
après le déclenchement d'une crise politique
au Mexique due au massacre de 45 Indiens le 22
décembre dans le village d'Acteal, près de
Chenalho, dans le Chiapas.
La démission de M. Chuayffet, qui a
justifié sa décision par des raisons
personnelles, était réclamée
après le massacre du Chiapas par l'opposition, qui
l'accusait de personnifier le "secteur le plus dur du
gouvernement".
M. Labastida, qui occupait jusqu'à sa nomination
le poste de ministre de l'Agriculture, a affirmé
qu'il ferait en sorte "que les accords de paix au Chiapas
soient appliqués".
Ces accords de paix doivent être appliqués
sous forme de loi, "car sans justice il n'y a pas de paix
durable, mais sans paix il n'y a pas de
développement, il n'y a pas de progrès" pour
surpasser "la pauvreté extrême qui touche de
nombreuses régions du pays", a-t-il affirmé.
Les accords de paix ont été signés
à San Andres en février 1996, mais leur
inclusion dans la Constitution par une proposition de loi
avait été désapprouvée avec
insistance par M. Chuayffet, connu pour gouverner d'une main
de fer.
M. Chuayffet s'en était toujours tenu à des
"observations juridiques" qui ont bloqué les
négociations depuis septembre 1996, la
guérilla de l'Armée zapatiste de
libération nationale (EZLN) affirmant de son
côté qu'il s'agissait seulement d'une
"manoeuvre" du gouvernement pour "dissimuler une solution
militaire".
Selon le nouveau ministre de l'Intérieur,
l'application des accords de paix doit servir de "base pour
éradiquer la violence et les agressions entre les
groupes" politiques et sociaux au Chiapas et doit
"être propice au développement de l'Etat et la
lutte contre la pauvreté".
L'enquête sur le massacre de 45 Indiens d'Acteal,
dans la zone de Chenalho, région zapatiste du
Chiapas, se poursuivra "jusqu'à ce que ces (faits)
tragiques et douloureux soient éclaircis" et que "les
responsables soient punis", a précisé M.
Labastida.
Le massacre avait entraîné une vague de
protestations aux niveaux national et international,
obligant M. Zedillo à sacrifier son ministre de
l'Intérieur, selon les analystes politiques.
La "seule façon d'arriver aux accords (avec
l'EZLN) est de ne pas encourager la division du pays et des
Mexicains", a expliqué M. Labastida.
L'"autre condition est qu'on ne peut accepter, sous aucun
prétexte, qu'un groupe impose sa manière de
vivre, sa croyance religieuse ou sa filiation", a-t-il
précisé, dans une allusion directe au coeur du
conflit et aux négociations au Chiapas,
c'est-à-dire la question de savoir comment introduire
le problème épineux de l'autonomie des Indiens
du Chiapas dans la Constitution.
Samedi, l'armée mexicaine a démenti dans un
communiqué l'information selon laquelle elle aurait
pris le quartier général zapatiste de La
Realidad, dans le Chiapas, comme on l'affirmait samedi matin
de sources écclésiastiques locales.
De son côté, l'évêque Samuel
Ruiz avait affirmé que leur était "parvenue
une information d'une personne que nous connaissons et qui
dit avoir été envoyée par la
communauté pour donner la nouvelle" selon laquelle
l'armée "avait pris ou était en train de
prendre" La Realidad, où se situe le fief du
sous-commandant Marcos, le chef des rebelles zapatistes.
"Les informations faisant état d'une prise ou de
l'occupation de localités sont fausses", a
précisé le commmuniqué de
l'armée, affirmant qu'il s'agissait d'une simple
opération de "saisie d'armes".
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