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Massacre des Indiens Chiapas

d'aprés les dépêches Agence France Presse et Reuters
du 1er au 9 janvier 1998


Le jeudi 1er janvier 1998,

Le samedi 3 janvier 1998,

Le dimanche 4 janvier 1998,

Le lundi 5 janvier 1998,

Le mardi 6 janvier 1998,

Le mercredi 7 janvier 1998,

Le jeudi 8 janvier 1998,

Le vendredi 9 janvier 1998,


Le jeudi 1er janvier 1998,

Chiapas - Les zapatistes commémorent le soulèvement de 1994

SAN CRISTOBAL DE LAS CASAS (Mexique), 1er janvier, Reuters - Les rebelles zapatistes sont sortis de leur clandestinité dans la nuit de mercredi à jeudi afin de dénoncer la "sale guerre" du gouvernement mexicain lors d'une marche aux flambeaux dans un village du Chiapas.

Quelques heures plus tôt, le sous-commandant Marcos, chef de l'Armée zapatiste de libération nationale (EZLN), avait mis en garde ses sympahtisants contre une nouvelle offensive de l'armée dans la région, après le massacre de 45 Indiens Totzils, le 22 décembre, dans le village d'Acteal.

Par des températures glaciales et plongés dans un épais brouillard, quelque 200 combattants zapatistes, le visage cagoulé, ont traversé le hameau montagnard d'Oventic, un bastion de l'EZLN, à une cinquantaine de km de la capitale de l'Etat du Chiapas.

Bravant les rumeurs de renforcement des patrouilles militaires dans la région, les zapatistes ont commémoré mercredi soir le quatrième anniversaire de l'insurrection du 1er janvier 1994 contre les autorités mexicaines, qui s'était soldée par 140 morts, aux cris de "Longue vie à Zapata" ou "Le combat continue".

Selon Le commandant David, membre du haut commandement de l'EZLN, les récents massacres perpétrés dans la région sont une preuve supplémentaire de la "sale guerre" que le gouvernement livre contre les civils du Chiapas, qui ravitaillent les rebelles.

"Ils tentent de faire dispaître les bases arrière de l'EZLN", a-t-il déclaré devant les quelques centaines de personnes rassemblées à Oventic.

La présence de l'armée a été renforcée au Chiapas, où ont été dépêchés 5.000 soldats stationnés dans les Etats voisins du Yucatan et de Campeche. Les militaires ont établi des barrages sur les axes routiers de la région afin de saisir les armes en circulation.

Les dirigeants indiens estiment que les groupes paramilitaires opérant au Chiapas sont composés d'hommes de main au service du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI), au pouvoir à Mexico, lequel se montre réfractaire aux revendications des zapatistes, qui militent pour les droits économiques et politiques des Indiens.

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Le samedi 3 janvier 1998,

Chiapas-Sécurité stricte à la prison des 46 suspects

par Caroline Brothers

TUXTLA GUTIERREZ (MEXIQUE), 3 janvier, Reuters - Des unités d'élite de la police mexicaine ont été affectées à la surveillance d'une prison surpeuplée de Tuxtla Gutierrez, capitale du Chiapas, où sont détenus 46 hommes soupçonnés d'implication dans le massacre de 45 Indiens le 22 décembre au village d'Acteal.

Les six derniers suspects ont été arrêtés le 31 décembre et transférés à Cerro Hueco dans un climat de tension grandissante au Chiapas, où des groupes paramilitaires sont engagés dans ce que beaucoup qualifient de "sale guerre" contre les partisans du mouvement zapatiste.

"Nous avons renforcé la sécurité ici. Le gouvernement de l'Etat a envoyé quarante éléments des forces de sécurité depuis le 28 décembre", a déclaré Eduardo Coutino Arrazola, directeur de la prison. "C'est une affaire spéciale, aussi observe-t-on une vigilance particulière."

Les autorités redoutent que le centre pénitentiaire, qui est conçu pour 500 détenus mais en abrite 870, ne se transforme un foyer d'agitation.

Dix-sept sympathisants de l'Armée zapatiste de libération nationale (EZLN), qui a déclenché une insurrection il y a quatre ans, sont aussi détenus à Cerro Hueco. La prison est construite sur une colline qui domine Tuxtla Gutierrez. Jeudi, des soldats ont découvert une cache d'armes en territoire zapatiste.

Parmi les 46 personnes soupçonnées de participation au massacre figure Jacinto Arias Cruz, membre du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI) au pouvoir et maire de la ville de Chenalho, proche du village d'Acteal. Les suspects sont accusés d'homicide volontaire et d'association de malfaiteurs.

L'affaire a plongé dans un profond embarras le gouvernement mexicain, qui résiste aux voix réclamant la démission du gouverneur du Chiapas et du ministre fédéral de l'Intérieur.

Vendredi, les autorités ont annoncé que la police avait saisi dans une autre cache des armes et des munitions semblables à celles qui ont été utilisées dans le massacre. La cache se trouvait derrière un tas de bois, en face de la maison de l'un des suspects.

Le juge Roberto Alejandro Navarro Suarez, qui est chargé de l'affaire, a déclaré que tous les suspects rejetaient les accusations portées contre eux. "Ils nient tous les faits et se déclarent innocents", a-t-il dit en ajoutant qu'il ne se laisserait pas imposer un verdict rapide.

"Nous devons respecter la loi, et aucune pression n'est exercée pour que l'on agisse précipitamment. Une décision pourrait prendre dix mois."

Des observateurs se rendent chaque jour à la prison pour y surveiller le traitement des 46 détenus, qui sont répartis dans onze dortoirs.

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Les accords de paix au Chiapas, dossier central du nouveau ministre de l'Intérieur

par Victor FLORES

MEXICO, 3 jan (AFP) - Le nouveau ministre de l'Intérieur mexicain nommé samedi, Francisco Labastida Ochoa, devra s'atteler à la délicate question des négociations de paix avec les rebelles zapatistes au Chiapas, suspendues depuis 15 mois, et à l'élaboration d'un nouveau plan de sécurité nationale.

Samedi, le président Ernesto Zedillo a, contre toute attente, accepté la démission du ministre de l'Intérieur Emilio Chuayffet, et a nommé à sa place M. Labastida, manifestant ainsi le premier signe décisif de l'exécutif après le déclenchement d'une crise politique au Mexique due au massacre de 45 Indiens le 22 décembre dans le village d'Acteal, près de Chenalho, dans le Chiapas.

La démission de M. Chuayffet, qui a justifié sa décision par des raisons personnelles, était réclamée après le massacre du Chiapas par l'opposition, qui l'accusait de personnifier le "secteur le plus dur du gouvernement".

M. Labastida, qui occupait jusqu'à sa nomination le poste de ministre de l'Agriculture, a affirmé qu'il ferait en sorte "que les accords de paix au Chiapas soient appliqués".

Ces accords de paix doivent être appliqués sous forme de loi, "car sans justice il n'y a pas de paix durable, mais sans paix il n'y a pas de développement, il n'y a pas de progrès" pour surpasser "la pauvreté extrême qui touche de nombreuses régions du pays", a-t-il affirmé.

Les accords de paix ont été signés à San Andres en février 1996, mais leur inclusion dans la Constitution par une proposition de loi avait été désapprouvée avec insistance par M. Chuayffet, connu pour gouverner d'une main de fer.

M. Chuayffet s'en était toujours tenu à des "observations juridiques" qui ont bloqué les négociations depuis septembre 1996, la guérilla de l'Armée zapatiste de libération nationale (EZLN) affirmant de son côté qu'il s'agissait seulement d'une "manoeuvre" du gouvernement pour "dissimuler une solution militaire".

Selon le nouveau ministre de l'Intérieur, l'application des accords de paix doit servir de "base pour éradiquer la violence et les agressions entre les groupes" politiques et sociaux au Chiapas et doit "être propice au développement de l'Etat et la lutte contre la pauvreté".

L'enquête sur le massacre de 45 Indiens d'Acteal, dans la zone de Chenalho, région zapatiste du Chiapas, se poursuivra "jusqu'à ce que ces (faits) tragiques et douloureux soient éclaircis" et que "les responsables soient punis", a précisé M. Labastida.

Le massacre avait entraîné une vague de protestations aux niveaux national et international, obligant M. Zedillo à sacrifier son ministre de l'Intérieur, selon les analystes politiques.

La "seule façon d'arriver aux accords (avec l'EZLN) est de ne pas encourager la division du pays et des Mexicains", a expliqué M. Labastida.

L'"autre condition est qu'on ne peut accepter, sous aucun prétexte, qu'un groupe impose sa manière de vivre, sa croyance religieuse ou sa filiation", a-t-il précisé, dans une allusion directe au coeur du conflit et aux négociations au Chiapas, c'est-à-dire la question de savoir comment introduire le problème épineux de l'autonomie des Indiens du Chiapas dans la Constitution.

Samedi, l'armée mexicaine a démenti dans un communiqué l'information selon laquelle elle aurait pris le quartier général zapatiste de La Realidad, dans le Chiapas, comme on l'affirmait samedi matin de sources écclésiastiques locales.

De son côté, l'évêque Samuel Ruiz avait affirmé que leur était "parvenue une information d'une personne que nous connaissons et qui dit avoir été envoyée par la communauté pour donner la nouvelle" selon laquelle l'armée "avait pris ou était en train de prendre" La Realidad, où se situe le fief du sous-commandant Marcos, le chef des rebelles zapatistes.

"Les informations faisant état d'une prise ou de l'occupation de localités sont fausses", a précisé le commmuniqué de l'armée, affirmant qu'il s'agissait d'une simple opération de "saisie d'armes".

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Le dimanche 4 janvier 1998,

L'armée mexiciane dans les environs de La Realidad

Par Antonio ORTEGA

LA REALIDAD (Mexique), 4 jan (AFP) - L'armée mexicaine se trouvait tôt dimanche dans les environs de La Realidad, au Chiapas (sud), mais n'occupait pas ce dernier bastion de l'Armée zapatiste de libération nationale (EZLN), rapporte l'envoyé spécial de l'AFP.

Selon les habitants de cette localité, le fief des hommes du sous-commandant Marcos, le chef des rebelles zapatistes, quelque 120 soldats avaient pris position samedi matin dans les environs de la localité à bord d'une trentaine de véhicules, avant de retourner dans l'après-midi à leur base située à 16 km de La Realidad.

Samedi soir, un communiqué du chef politique de l'EZLN pour la zone de Los Altos, dans l'Etat du Chiapas (1.200 km au sud-est de Mexico), le commandant David, a affirmé dans un communiqué qu'une colonne des unités spéciales de l'armée "était en train d'interpeller et de torturer les habitants dans les environs de La Realidad pour tenter de leur arracher des informations sur le lieu où se trouvait Marcos".

Les troupes sont restées dans le secteur pendant une douzaine d'heures, selon les habitants de la localité.

Le ministère de la Défense a "démenti catégoriquement" des informations de plusieurs organes de presse internationaux, selon lesquelles l'armée avait pris La Realidad.

Cette rumeur constitue "une provocation délibérée pour tromper l'opinion publique", a estimé José Gomez Salazar, commandant de la 7è région militaire, lord d'une conférence de presse à San Christobal de Las Casas.

L'évêque de San Cristobal, Samuel Ruiz, et son vicaire, Gonzalo Ituarte, ont fait état samedi matin à deux reprises de survols d'avions militaires au-dessus de La Realidad, nouvelles reçues par eux par l'intermédiaire d'appels téléphoniques "de gens connus de nous" depuis la ville de Las Margaritas, à l'entrée de la zone zapatiste.

Le renforcement de la présence militaire autour de La Realidad a commencé à 07H00 (13H00 GMT) samedi, quand 30 véhicules de transport de troupes, venant de la base de Guadalupe Tepeyac, sont arrivés dans la zone.

A La Realidad même, Ramon, un Indien qui se déclare "représentant du village," raconte que des éléments de l'armée ont quitté la montagne et se sont déployés dans les alentours.

A un moment, huit soldats sont descendus d'un camion, ont traversé la localité, suscitant l'inquiétude des quelque 300 habitants.

Ce responsable municipal explique que les soldats ont rencontré des Indiens dans des cafés, les ont brièvement interpellés en les menacant.

Ramon affirme que certains furent interceptés par les militaires qui les ont obligés à s'asseoir, "les menacant de leurs armes pointées sur la poitrine. "

D'autres Indiens racontent que des soldats ont seulement procédé à des contrôles d'identité.

Toujours selon le témoignage de ces habitants, quand 10 camions ont commencé à revenir de Guadalupe Tepeyac vers La Realidad, ils ne transportaient pas de soldats.

Cette guerre de communiqués et cette tension intervient après l'annonce samedi de la démission du ministre de l'Intérieur, Emilio Chuayffet, par le président Ernesto Zedillo.

Cette démission était réclamée par l'opposition après le massacre le 22 décembre par des commandos paramilitaires proches du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI, au pouvoir) de 45 Indiens dans le village d'Acteal, situé dans le Chiapas.

La guerilla zapatiste est apparue le 1 janvier 1994. Depuis un an, les négociations entre les zapatistes et les autorités sont au point mort, le gouvernement refusant notamment de céder à une demande de des zapatistes d'obtenir l'autonomie pour les communautés indiennes du Chiapas.

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Le lundi 5 janvier 1998,

Le président Zedillo vérouille l'économie mexicaine pour les prochaines années

André BIRUKOFF

MEXICO, 5 jan (AFP) - Le président mexicain Ernesto Zedillo a vérouillé la politique économique de son pays pour les années à venir en plaçant à la tête du ministère des Finances et de la Banque Central deux partisans incontestables du néolibéralisme.

Surnommé l'"Ange de la Dépendance" par ses détracteurs qui le considèrent comme entièrement subordonné aux directives économiques des Etats-Unis, l'ancien ministre des Affaires Etrangères, José Angel Gurria, 46 ans, a été nommé lundi ministre des Finances après que l'ancien titulaire du poste, Guillermo Ortiz, 65 ans, eut été désigné le 15 décembre dernier à la tête de la Banque Centrale.

En prenant ses fonctions le nouveau ministre des Finances a fait d'emblée une concession à l'opposition en affirmant qu'une de ses priorités serait la lutte contre le chômage.

L'opposition, majoritaire à la Chambre depuis les législatives de juillet dernier, a effet multiplié les critiques contre le néolibéralisme du président Zedillo qualifié même d'anti-social notamment par le Parti de la Révolution Démocratique de centre-gauche.

Toutefois, alors que l'opposition a également réclamé une baisse sensible des impôts, le nouveau ministre des Finances a clairement indiqué que son objectif serait tout autant de veiller à "la discipline fiscale et monétaire afin de préserver la stabilité des prix" et la "confiance aussi bien interne qu'externe" à l'égard de l'économie mexicaine.

Economiste de formation, M. Gurria qui a étudié à Harvard est considéré comme l'homme qui a réussi a renégocier de 1989 à 1990 avec succès la dette mexicaine alors qu'il occupait le poste de vice-ministre des Finances de 1989 à 1993, sous la présidence de Carlos Salinas.

Lundi, lors de la passation de pouvoir, le prédecesseur de M. Gurria, Guillermo Ortiz, considéré lui comme l'auteur du redressement économique mexicain après la grave crise financière de 1994-1995, a de son côté indiqué que sa tache principale à la tête de la Banque Centrale serait la lutte contre l'inflation passé à 16 % en 1997 alors qu'elle avait été de 27 % en 1996.

"Il faut consolider le redressement économique afin de parvenir à une croissance soutenue qui permette de réduire les inégalités", a déclaré le nouveau gouverneur de la Banque Centrale.

Approuvant les stratégies des deux hommes, désormais les personnages-clés de l'économie mexicaine, le président Zedillo a indiqué de son côté que la fin de son mandat (jusqu'à l'an 2.000) "sera fort dans le domaine économique" et "installera les base d'une croissance à long terme".

La nomination de Jose Angel Gurria, dont le remplacant à la tête de la diplomatie mexicaine n'a pas encore été désigné, intervient deux jours après celle du nouveau ministre de l'Interieur, Francisco Labastida Ochoa.

M. Labastida a été nommé en remplacement d'Emilio Chuayffet, limogé en grande partie pour sa gestion de la crise du Chiapas (sud du Mexique) considérablement aggravée par le massacre le 22 décembre dernier de 45 Indiens tzotziles par des paramilitaires liés au Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI, au pouvoir depuis 68 ans).

Même si la nomination de M. Gurria apparaît comme totalement indépendante des événements du Chiapas, elle n'en traduit pas moins, comme celle de M. Labastida a l'Intérieur, la volonté du président Zedillo de s'entourer d'hommes de confiance au postes-clés de la politique mexicaine, estiment les analystes.

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Le mardi 6 janvier 1998,

L'armée poursuit ses perquisitions systématiques au Chiapas

SAN CRISTOBAL (Mexique), 6 jan (AFP) - L'armée poursuivait mardi ses perquisitions systématiques afin de saisir les armes aussi bien des groupes paramilitaires que des guerilleros zapatistes du Chiapas (sud du Mexique) après avoir découvert la veille un arsenal rebelle près de San Cristobal (1. 200 km au sud-est de Mexico).

Les patrouilles de l'armée, appuyées par des véhicules blindés, se poursuivaient mardi avec d'autant plus d'intensité que la veille les militaires ont affirmé avoir découvert à Altamirano (à une centaine de km à l'est de San Cristobal), un village considéré comme un des fiefs des guerilleros de l'EZLN (Armée Zapatiste de Libération Nationale), une cache d'armes dans une maison utilisée comme place-forte par des zapatistes.

Depuis le 25 décembre dernier, début des perquisitions de l'armée décidées après le massacre trois jours avant de 45 Indiens au village d'Acteal près de San Cristobal, le ministère de la Défense a annoncé la découverte au total de 40 armes de divers calibres et de 14.000 cartouches dans plusieurs villages des montagnes du Chiapas.

Ainsi, vingt armes et 2.765 cartouches ont en particulier été découvertes dans les villages d'obédience zapatistes d'Ocosingo, Altamirano et Las Margaritas, tandis que 7 armes et 11.331 cartouches ont été saisies dans des localités tenus par les groupes paramilitaires, soupçonnées pour la plupart d'être liées au Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI, au pouvoir depuis 68).

Dans les villages tenus par les paramilitaires, des spécialistes de l'armée s'efforcent également de repérer les communications radios entre les divers commandos.

Les perquisitions de l'armée ont conservé un rythme intense après la nomination samedi dernier d'un nouveau ministre de l'Intérieur, Francisco Labastida. Dès son entrée en fonction, M. Labastida a indiqué qu'une des conditions pour résoudre le problème du Chiapas était, selon lui, de désarmer tous les protagonistes du conflit aussi bien paramilitaires que zapatistes.

Francisco Labastida a été nommé en remplacement d'Emilio Chuayffet, considéré comme un "faucon" du gouvernement du président Erenesto Zedillo, et dont la gestion de la crise du Chiapas avait été vivement critiquée en particulier par l'opposition.

La présence renforcée de l'armée au Chiapas, dont les effectifs totaux sont évalués actuellement à environ 30.000 hommes, a nettement accru la tension dans la région en particulier depuis que les militaires ont effectué des patrouilles à proximité du village de La Realidad, proche du quartier général du chef suprême de la guerilla, le sous-commandant Marcos.

Alors que le gouvernement a multiplié, après le massacre d'Acteal, les propositions en vue d'une reprise rapide de négociations interrompues depuis un an, le leader guerillero qui a rendu le président Zedillo directement responsable du massacre d'Actel, s'est abstenu pour le moment de répondre directement aux nouvelles offres de paix des autorités.

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Le mercredi 7 janvier 1998,

Le massacre d'Acteal provoque de sérieux remous au sein du pouvoir

André BIRUKOFF

MEXICO, 7 jan (AFP) - Le massacre il y a trois semaines de 45 Indiens au Chiapas (sud du Mexique) provoque de graves remous au sein du pouvoir et le gouverneur de cet Etat --bastion de la guérilla zapatiste-- a décidé mercredi de démissionner, quatre jours après le limogeage du ministre de l'Intérieur.

Membre du Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI, au pouvoir depuis 68 ans) Julio Cesar Ruiz Ferro a présenté sa démission après avoir été vivement critiqué pour n'avoir su ni prévenir ni empêcher le massacre le 22 décembre dernier de 45 Indiens tzotziles par des paramilitaires, soupçonnés d'être liés au parti au pouvoir.

Confirmant la démission du gouverneur, le nouveau ministre de l'Intérieur, Francisco Labastida, considéré comme un proche du président Ernesto Zedillo, a aussitôt fait part de son soulagement en déclarant que le départ de M. Ruiz Ferro allait "contribuer à détendre la situation de conflit au Chiapas" et "à renforcer le climat de confiance que recherche le gouvernement".

Le massacre d'Acteal près de San Cristobal (à 1.200 km au sud-est de Mexico) apparaît donc désormais comme un révélateur de l'impuissance du gouvernement mexicain à résoudre jusqu'à prèsent un conflit, apparu dans toute son ampleur le 1er janvier 1994 avec le début du soulèvement armé de la guérilla de l'Armée Zapatiste de Libération Nationale (EZLN), dirigée par le sous-commandant Marcos.

Conscient de cette situation, le pouvoir semble vouloir actuellement reprendre l'initiative et la démission du gouverneur du Chiapas --l'un des Etats des plus pauvres du Mexique-- semble aller dans le même sens que le limogeage inattendu, samedi dernier, d'Emilio Chuayffet, un "faucon" du gouvernement du président Zedillo.

M. Chuayffet avait été rendu responsable, en particulier par l'oppostion, de l'aggravation de la tension au Chiapas.

En prenant la succession de M. Chuayffet, Francisco Labastida a annoncé un changement de politique et n'a pas écarté l'éventualité d'une rencontre face à face avec le chef suprême des zapatistes, le sous-commandant Marcos.

Toutefois, en faisant de nouvelles offres de paix, M. Labastida a dans le même temps augmenté la pression sur les guérilleros zapatistes en poursuivant le renforcement de la présence de l'armée au Chiapas, dont les effectifs sont actuellement évalués à quelque 30.000 hommes.

Appuyés par des véhicules blindés, l'armée multiplie les patrouilles afin de saisir les armes aussi bien des groupes paramilitaires que des guérilleros zapatistes.

Il reste que le dialogue entre les autorités et les guérilleros, interrompu depuis un an, reste bloqué. Même si après le massacre d'Acteal les autorités ont fait de nouvelles propositions pour reprendre les discussions, elles n'ont toujours pas accepté une demande de la guérilla d'obtenir l'autonomie pour les Indiens du Chiapas.

De son côté, le sous-commandant Marcos, qui a rendu le président Zedillo directement responsable du massacre, s'est abstenu de répondre directement aux nouvelles offres de paix, préférant pour le moment garder le silence.

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Le jeudi 8 janvier 1998,

Le sous-commandant Marcos accuse l'armée de chercher l'affrontement

SAN CRISTOBAL (Mexique), 8 jan (AFP) - Le leader des guerilleros du Chiapas (sud du pays), le sous-commandant Marcos, a accusé l'armée de chercher l'affrontement avec son mouvement estimant que le dialogue avec le pouvoir était "brisé" après le massacre de 45 Indiens il y a trois semaines.

"Accomplissant les ordres de son chef suprême (Ernesto Zedillo), président du Mexique, l'armée mène une offensive contre l'EZLN (Armée Zapatiste de Libération Nationale) afin de provoquer des affrontements armés", a affirmé le sous-commandant Marcos dans un communiqué parvenu mercredi à l'AFP.

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Le dialogue entre les autorités et les zapatistes reste dans l'impasse

par André

MEXICO, 8 jan (AFP) - Le dialogue entre les autorités et les zapatistes reste dans l'impasse près de trois semaines après le massacre de 45 Indiens au Chiapas où la tension demeure vive, le chef de la guerilla, le sous-commandant Marcos ayant mis en garde contre de possibles affrontements avec l'armée.

Le leader guerillero a en effet estimé dans un communiqué diffusé mercredi soir que les autorités avaient volontairement "brisé" le dialogue avec l'EZLN (Armée Zapatiste de Libération Nationale).

En utilisant cette formule le sous-commandant Marcos a semblé vouloir signifier qu'après le massacre le 22 décembre dernier de 45 Indiens à Acteal près de San Cristobal (une des principales villes du Chiapas, à 1.200 km au sud-est de Mexico), une reprise à court terme de discussions interrompues depuis plus d'un an était pratiquement impossible.

Le chef zapatiste dans le même temps n'a pas hésité à dramatiser la situation en affirmant que le renforcement de la présence militaire au Chiapas avait un caractère explosif dans la mesure où des affrontements directs entre militaires et guerilleros pouvaient désormais survenir à tout moment.

"Accomplissant les ordres de son chef suprême (Ernesto Zedillo), président du Mexique, l'armée mène une offensive contre l'EZLN afin de provoquer des affrontements armés", a affirmé le sous-commandant Marcos.

Depuis le massacre d'Acteal les militaires, appuyés par des véhicules blindés, patrouillent systèmatiquement près des villages zapatistes du Chiapas et leurs effectifs sont estimés actuellement à près 30.000 hommes alors que les zapatistes, selon diverses sources, ne sont en mesure de rassembler que quelque 2.000 à 3.000 guerilleros.

Ce rapport de force de 10 contre 1 en faveur de l'armée ne peut qu'inquiéter le sous-commandant Marcos dont les troupes ne semblent pas en mesure de résister longtemps à une offensive généralisée.

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Le vendredi 9 janvier 1998,

Polémique au Chiapas après les accusations de l'armée

par Jesus Ramirez

TUXTLA GUTIERREZ (MEXIQUE), 9 janvier, Reuters - Le général Jose Gomez Salazar, commandant de la VIIe région militaire mexicaine qui couvre le Chiapas, est en partie revenu vendredi soir sur ses accusations contre l'évêque de San Cristobal de Las Casas, Mgr Samuel Ruiz.

Devant la presse réunie au quartier général de Tuxtla Gutierrez, le général Gomez avait affirmé posséder une preuve formelle établissant l'exisence de liens entre l'évêque du diocèse de San Cristobal de Las Casas et l'Armée zapatiste de libération nationale (EZLN).

Le document que le général Gomez avait montré aux journalistes était une lettre retrouvée dans une cache d'armes qui appartiendrait aux zapatistes et signée sous le pseudonyme de "Caminante".

Selon le général, il était "évident" que "Caminante" et Mgr Samuel Ruiz sont un seul et même homme.

Mgr Ruiz, évêque catholique de San Cristobal, préside la Commission nationale d'intermédiation (CONAI), organisme de médiation entre le gouvernement fédéral mexicain et l'EZLN.

Défenseur des droits des communautés indigènes, il est perçu comme partageant les objectifs de la rébellion zapatiste apparue le 1er janvier 1994 et nombre de propriétaires terriens de l'Etat du Chiapas estiment qu'il est même étroitement lié à l'EZLN.

D'autres le disent très impliqué dans la Théologie de la libération, doctrine catholique que le Vatican juge marxisante.

Mais face au tir de barrage déclenché par ses propos, notamment le démenti catégorique du clergé local, le général Gomez a publié dans la soirée un communiqué selon lequel ses déclarations à la presse ne reflétaient pas une position officielle.

"Interrogé (par les journalistes), j'ai exprimé une opinion qui n'était pas officielle, mais plutôt une opinion personnelle", écrit le commandant de la VIIe région militaire.

"Sombres intérêts"

Mgr Ruiz, qui rencontrait vendredi le nouveau gouverneur du Chiapas, Roberto Albores Guillen, n'avait pas réagi personnellement aux accusations du général mexicain

Mais son coadjuteur, Mgr Raul Vera, qui doit lui succéder cette année à la tête du diocèse, a catégoriquement rejeté les "évidences" du général Gomez.

"Ce que Mgr Ruiz fait dans le Chiapas est purement pastoral. Il ne reçoit ordre et instruction de la part de personne", a-t-il assuré après s'être interrogé sur les "sombres intérêts [qui] se cachent derrière toutes ces histoires".

Par ailleurs, le diocèse de San Cristobal de Las Casas a officiellement répondu au ministère de la Défense qui annonçait que deux exemplaires d'un ouvrage religieux rédigé en dialecte indien par Mgr Ruiz avaient également été retrouvés dans la cache au milieu d'armes, de munition, d'explosifs et de documents qui appartiennent sans aucun doute, selon l'armée, à L'EZLN.

Dans un communiqué, le diocèse souligne que cet ouvrage est une traduction de l'évangile de Saint-Marc et d'autres textes évangéliques.

"Nous ne pouvons cesser de nous interroger sur la façon dont la présence de ces livres évangéliques qui sont à la disposition de tout catholique est à présent analysée comme preuve que l'Eglise est liée à un mouvement armé", poursuit le communiqué.

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